.

cliquer sur l'image pour la version audio

 

           Ça arrivait toujours. À un moment ou à un autre, il y en avait un qui levait la tête... et qui la voyait.

Ils devaient suivre son regard.

Au début ils parlaient, ils parlaient… Ils disaient comme tu as bonne mine aujourd'hui, hein qu'il a bonne mine ?

Il aurait pu répondre, mais quoi ? leur dire ne vous donnez pas la peine. Votre ton guilleret est pire que tout, taisez-vous donc.

Puis ils déballaient leur pathétique offrande. Tiens disaient-ils, maman a fait de la tarte aux pommes, tu vas goûter. Ils lui fourraient un morceau dans la bouche qui dégringolait sur le drap. Il aurait pu l'avaler, le morceau de pomme, mais jouer les légumes était sa dernière liberté. Il riait intérieurement de ce bon tour.

Puis ils ne savaient plus quoi dire. Ils se levaient, allaient à la fenêtre, disaient que le temps est à la pluie, que ça fera du bien aux jardins. Revenaient, s'asseyaient à nouveau. Et vite comblaient le vide. Il aurait voulu le silence, qu'ils puissent penser ensemble, au lieu de cette agitation qui l'anéantissait.

Ça arrivait toujours, à un moment ou à un autre, il y en avait un qui suivait son regard et levait la tête... et qui la voyait. La tache au plafond. Sombre.

Certains jours il se disait que le type qui l'avait précédé avait eu la force de cracher son café jusqu'au plafond. D'autres il imaginait qu'un crime avait été commis à l'étage supérieur et que la tache de sang allait s'agrandir, s'agrandir…

Elle lui tenait compagnie, la tache.

Chaque matin quand le cliquetis du chariot de la soignante le tirait du brouillard épais des somnifères, il ouvrait les yeux, voyait la tache et se disait "je vis encore ".

 

bonus >>>> CLIC

 

Retour à l'accueil