nous ne vieillirons pas ensemble

          Je suppose que tu lis ces mots dans le TGV qui te ramène à Paris, parce que tu viens de trouver la lettre que je vais glisser à côté de ton billet de train.

Il est probable que je suis à rassembler mes affaires devant un lit défait.

En pleurant, comme je pleure en écrivant.

 

Ô mon amour, mon doux, mon tendre, mon merveilleux amour, c'est fini. C'est la dernière fois.

Never more.

Jamais plus.

Je tranche dans le vif, amputation sans anesthésie. J'ai demandé ma mutation outremer, je pars la semaine prochaine.

Nous ne vieillirons pas ensemble.

Mais cela tu le savais, n'est-ce pas, depuis le début ?

Je ne t'ai jamais demandé d'abandonner ta famille. Je n'aurais rien pu construire sur le malheur des enfants.

Je ne veux pas devenir collante, puis larmoyante, et peut être te faire pitié.

Notre histoire n'est pas un voyage au long cours, laisse-moi en faire une croisière flamboyante.

Tu m'as souvent reproché de mettre ma vie en scène, de faire de la littérature avec le quotidien. C'est vrai. Je veux que notre histoire reste parfaite, un souvenir que nous garderons comme un joyau au fond de nous, intact.

 

Tu regardes le paysage défiler à toute vitesse et tu as mal. Un mal de chien, j'imagine. Tu te feras consoler. Il y a toujours des femmes pour consoler les hommes. C'est ainsi. Et c'est bien.

 

Je sais en écrivant ces mots, comme je saurai demain, en regardant un lit défait, que la plaie en moi restera béante, comme ces crevasses d'après séisme, qui laissent la terre poignardée.

Mais je continuerai, et j'aurai moi aussi des enfants. Ils n'auront pas comme toi cette mèche rebelle et les paillettes qui s'allument dans tes yeux quand tu ris.

Mais je les aimerai tendrement, doucement ; et quand ils m'auront abandonnée à leur tour, je vieillirai, parce qu'il faut bien vieillir, avec ton souvenir.

 

Tu te rappelles comme j'ai pleuré au cinéma en entendant " Il était mon Nord, mon Sud, mon Est, mon Ouest " ? Tu t'es moqué de moi, te souviens-tu ?

 

Tu es mon nord, mon sud, mon est et mon ouest.

 

Des collègues parfois me parleront de toi.

Et je dirai de toi qui fus ma vie,

de toi qui fus ma force et ma douceur :

"comment va-t-il ? " *

* P Géraldy

 

les histoires d'amour finissent mal, en général,

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