C'est une langue belle avec des mots superbes
Qui porte son histoire à travers ses accents
Où l'on sent la musique et le parfum des herbes
Le fromage de chèvre et le pain de froment
[1]

Une langue qu'on aime au point de s'étriper au sujet de l'accent circonflexe, ou la féminisation des noms de métier, dans un pays où la dictée a été élevée au rang de jeu télévisé…

 

Une langue de pinailleurs, qui a un mot précis pour désigner “la répétition de groupes de mots qui semblent fonctionner de manière autonome alors que la poursuite du texte montre que ces termes étaient en réalité les annonces d’un développement dont ils constituent les éléments” (épanode), ou "la répétition de formes morpho syntaxiques sur la base d'un parallélisme grammatical des morphèmes" , (homroptote), qui a décidé que la forme de rime  interne dans "Du pain, du vin, du boursin"  s'appellera : homeoteleute !!!!

A l'occasion de la st valentin, miletune[2] propose de broder sur cette image

 

          Les journalistes ne doivent pas oublier qu’une phrase se compose d’un sujet d’un verbe et d’un complément. Ceux qui voudront user d’un adjectif passeront me voir dans mon bureau. Ceux qui emploieront un adverbe seront foutus à la porte.

circulaire de G. Clémenceau (alors rédacteur en chef de L’Aurore)

 

Hugo disait que l'adjectif est la graisse du style, et il est vrai que l'adjectif est souvent superflu, et inutilement explicatif ;  de même que l'adverbe, qui en est en quelque sorte la paraphrase lourde et appuyée, pour  répondre à la question "comment ?" avant même qu'elle se pose, et même si elle ne se pose pas.

 

Comme la musique des films qui dit : c'est là qu'il faut avoir peur, ou préparez les mouchoirs, adjectifs et adverbes explicitent, zooment, insistent, surlignent ; didascalie, indication de jeu. Du théâtre, en somme.

 

L'adverbe en "ment"  ment, quelquefois,  flatte, dissimule, embobine…

 

Sincèrement vôtre. Tu parles !

Les formules de politesse sont l'héritage des courbettes du grand siècle,  respectueusement, je vous baise les mains, monsieur le député, votre honneur, votre sainteté, votre grandeur… à défaut de pouvoir dire ce que je pense réellement de vous, qui allez me refuser, une indemnité, un  passe-droit, un emploi…

Dis-moi ce que t'en penses, sincèrement ! est carrément blessant, cela présuppose que d'ordinaire l'interlocuteur ment !

Il l'a fait sciemment, ne qualifie  pas  le savoir ou la compétence du personnage, mais sous-entend  sa perversité.

Et combien d'adverbes en ment dans les éléments et les tics de langage si contagieux, dès lors qu'il faut convaincre ou manipuler ! Combien de personnages médiatiques emploient "effectivement " toutes les deux phrases, comme s'ils avaient besoin de se  persuader eux-mêmes;?

 

Clairement, (ou il est clair que…) est un fleuron de la langue de bois[3], précisément quand le propos n'est pas clair du tout, voire trafiqué.

 

Et que pense la dame (du siècle dernier) qui reçoit une lettre terminée par   "celui qui t'aime sincèrement "?

 "je t'aime", voire JTM, aurait été sans doute plus percutant ; encore que follement, passionnément, éperdument, accompagnés de quelques petits cœurs irrésistiblement féminins, délicieusement rétrogrades auraient été joliment décoratifs, en ce jour de ST Valentin…

 

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