11 Juin 2010
source image clic
Amour dans le faré sur le lagon alangui. Ua here vau ia oe, je t'aime. Amour, m'mour, t'amour, tamouré. Ukulélé. Pluie chaude sur les tiarés. Hélas mon amant ne s'appelle pas Rereao ou Tahitoa. Il n'a pas la peau dorée et ne pose pas sur les brochures du club med un harpon à la main. Le mien c'est René Dugenou, employé des postes à Papeete. Il plie bien soigneusement son petit polo écru sur le fauteuil Emmanuelle de l'hôtel. Le paradis n'est plus ce qu'il était. Paradis chamallow d'une langue de voyelles.
La consonne, voila ce qui fait le nerf. Le nerf de quoi ? Prenez Czardas par exemple. Le violoniste a le nez en bec d'aigle, l'œil sombre sous une mèche qui tombe, et donne des coups d'archet sauvages et râpeux comme le Z. Là où « je t'aime » se dit « szeretlek » il ne faut pas probablement attendre de voluptés languides. Brandebourgs, torse avantageux, Les officiers font valser la mousseline sous les lustres de cristal. La danse et la guerre, voilà la belle vie des hommes. Mon amant est là. Sissi. Non ce n'est pas Franz le beau lieutenant à la lippe enfantine, ni Django, le tzigane au violon. Mon amant s'appelle René Sorel, précepteur quelque peu gringalet chez les Habsbourg, la branche des Habsbourg de Coblenz, établie dans le commerce des canons.
La czardas on s'en lasse, on finit par rêver de maracas. Mon amant de Caracas n'est pas Ezequias, l'insolent directeur de l'aéroport qui m'a retenue 3 heures pour un petit flacon d'Eau sauvage que j'ai amené au cas où. Pourtant il s'en est fallu de peu. Dieu qu'il était beau dans son costume blanc ! Finalement, c'est René Martin, mon voisin de voyage, qui a hérité de l'eau sauvage. Eu te amo. Enfin, un peu. En échange il m'a filé sa rhinite virale. Somme toute une déception, quand je rêvais d'entendre « el condor pasa » joué par une troupe de ponchos, mais Lima était complet. Incas de force majeure.
Un cas aussi que la balalaïka, le luth des toundras ... Un cas à garder dans mes annales. (Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit). Mon amant s'appelle Michal, et c'est le plus beau de Mejdouretchensk. Il joue « les yeux noirs » à la balalaïka. Je regrette de n'avoir pas eu des parents communistes. Hélas, pour quelques kopecks, il susurre « ia tibia lioubliou » aux autres retraitées de l'Indre qui ont fait le voyage avec moi, voire « men seni sevaman », après 3 vodkas, da, parce que sa mère est Ousbèque ! Je regrette mon eau sauvage.
C'est là que j'ai ressenti un manque de rythme et de chaleur. Je me souviens d'Aldembe qui chantait « na moula, na moula » en tapant sur son djembe. Sa peau de bronze sur laquelle le feu jetait des éclairs fauves enflammait mes sens. Tam tam sur mon pauvre coeur tandis que René, originaire de Pithiviers, employé intérimaire au Mac Do de Dgamenou me tenait la main, d'une façon non équivoque, quoique moite.